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La révolution dans l’infrastructure des services financiers

Lors de la deuxième décennie du XXIème siècle, l’innovation digitale s’est accélérée et s’est démocratisée. Ainsi, une vraie révolution est en marche dans l’infrastructure des services financiers grâce à la maturation de technologies émergentes telles que la blockchain ou l’intelligence artificielle. Pour en savoir plus, nous avons interviewé Lambert Despaux, diplômé de l’EDHEC et Founding Partner de ‎la fintech VC, Schema Capital. Aussi, nous en avons profité pour évoquer la Blockchain et son apport concret à la finance mondiale.

- Flm : Pouvez-vous nous présenter votre société de capital-risque et votre politique de choix des startups ?

Lambert Despaux (LD) : Schema Capital est une société de gestion en capital-risque spécialisée dans ce que nous avons nommé la « deep fintech », c’est-à-dire toutes les technologies en lien avec l’infrastructure du système financier.

Il est clair que le secteur de la finance subit une mutation sans précédent depuis 2008. Les premières startups se sont attaquées principalement à la modernisation des services aux consommateurs (néo-banques, néo-assureurs, paiements, trading) ou au comblement du vide de financement laissé par les banques (financements privés basés sur l’analyse de données, crowdfunding, prêts entre particuliers, etc.).

Plus récemment, la maturation de technologies émergentes telles que la blockchain ou l’intelligence artificielle entraîne une vraie révolution au sein de l’infrastructure des services financiers et menace l’ensemble des systèmes en place, notamment dans le domaine des paiements, de l’émission et la gestion de titres financiers privés (et dans une moindre mesure publics), des opérations de back et de middle office, des prêts et des produits dérivés, pour ne citer qu’eux.

Bien que la construction de la fondation de ces nouvelles technologies ne soit pas encore tout à fait achevée, déjà de nouveaux écosystèmes se créent et elles commencent à s’immiscer dans les services financiers traditionnels.

Seulement, en Europe surtout, le capital disponible pour supporter ces nouvelles initiatives est compartimenté avec, d’un côté, les fonds traditionnels s’y aventurant rarement et, de l’autre, les fonds spécialisés qui ne s’intéressent pas à la finance traditionnelle.

Nous avons vocation à combler cet écart en finançant de jeunes entreprises dédiées à la modernisation de l’infrastructure financière actuelle avec ces nouvelles technologies. De surcroît, nous investissons très tôt dans la vie de ces entreprises, là où le besoin en support (financier et conseil) se fait le plus sentir.

- Flm : Nous savons que vous êtes un spécialiste de la technologie Blockchain. Pouvez-vous nous expliquer le plus de cette technologie par rapport aux solutions digitales classiques ?

LD : Le système financier tel que nous le connaissons s’est construit autour de la centralisation, nécessaire aux besoins de l’époque. Dans l’antiquité, les états ont centralisé les monnaies d’échange pour simplifier le commerce et à partir du XIIe siècle les banques ont centralisé les dépôts pour sécuriser les biens des commerçants. La finance a évolué depuis mais les principes sont restés les mêmes : dépositaires et chambres de compensation s’assurent de la sécurité de nos actifs et limitent la fraude.

Contrairement aux idées reçues, les institutions financières sont très innovantes et elles ont été le fer de lance de la digitalisation de la société pendant la deuxième moitié du XXe siècle et le début de ce siècle, de la généralisation du distributeur à billets dès la fin des années soixante à la mise en place d’une infrastructure entièrement digitale permettant à des algorithmes de passer des ordres d’achat et de vente sur des marchés mondiaux vingt-quatre heures sur vingt-quatre et sept jours sur sept. Après 2008, les fintech (jeunes entreprises développant des technologies dédiées à l’industrie financière) ont pris le relais de l’innovation financière mais construisent des solutions encore basées sur l’infrastructure financière historique et centralisée.

La blockchain a été pensée sur un modèle radicalement différent permettant de se passer d’organismes intermédiaires pour transférer de la valeur sans possibilité de fraude. Les livres de comptes sont simultanément tenus par plusieurs agents dont l’honnêteté est assurée par des mécanismes inspirés de la théorie des jeux. Cette décentralisation assure l’immuabilité et la transparence de ces livres de compte, un concept clef pour l’application de la technologie au sein des services financiers.

Ainsi, la blockchain permet à plusieurs institutions financières (qui ne se font pas totalement confiance) de mettre des ressources en commun pour partager de l’information (sans forcément la révéler à tous les agents du réseau), réputée immuable, et ainsi potentiellement éliminer toutes leurs tâches de réconciliation et de contrôle qui leurs coûtent aujourd’hui des milliards de dollars. Il ne s’agit plus d’optimisation de coûts mais bien de leur élimination. Il est à noter que ce type d’applications est extrêmement récent : R3, le majeur fournisseur de technologie blockchain pour les institutions financières, n’a sorti la version stable de son produit qu’en 2018.

Par ailleurs, la propriété immuable de la blockchain permet, pour la première fois, de représenter des titres de propriété (et leur valeur associée) sans autorité centrale. Ceci permet de digitaliser des parts de sociétés non-cotées détenant tout actif financier et de les distribuer librement et simplement à l’échelle mondiale. Ces parts digitales étant programmables, les règles de KYC et d’AML peuvent être automatisées et ne nécessiter aucune intervention après que les parties ont été validés au moins une fois.

Des bourses d’échange dédiées aux titres digitaux ont d’ores et déjà été créées et les bourses traditionnelles telles que Euronext, Deutsche Börse ou SIX ont investi pour se préparer à la montée en puissance du trading de ces titres, dont les volumes d’échanges pourraient potentiellement atteindre voire dépasser ceux des crypto-monnaies.

Enfin, la blockchain a ouvert la voie à une créativité financière totalement nouvelle : quelques lignes de code suffisent à créer des produits financiers « plain vanilla » où des produits dérivés dont les règles d’émission, de rendement et de cession sont fixées algorithmiquement en avance. Il s’agit de la « Decentralized Finance » ou DeFi. En avril 2020, la valeur monétaire investie dans ces produits s’élevaient à environ 600 millions de dollars. Il y a seulement quelques jours, ces produits financiers représentaient 43 milliards de dollars, laissant présager un fort développement de ce type d’actifs.

- Flm : Quels sont les pays les plus en avance pour cette technologie ?

LD : De très loin, les Etats-Unis et la Chine.

Les Etats-Unis, parce que le Bitcoin a, dès 2013, attiré l’attention de plusieurs financiers qui ont créé des fonds d’investissement dédiés. Ces fonds ont participé successivement au développement des crypto-monnaies post-bitcoin puis au développement d’écosystèmes d’applications décentralisés tels que celui d’Ethereum.

La Chine, parce que dans un premier temps les fabricants de matériel de mining (le processus de validation des transactions du réseau) de Bitcoin du pays ont su prendre l’avantage sur leurs compétiteurs internationaux, entraînant un intérêt de la part de la population chinoise dont les habitudes de consommation de produits financiers sont tournées vers la technologie. Dans un deuxième temps parce que, après avoir banni les cryptomonnaies en 2017, l’état chinois à fait de la blockchain une priorité d’innovation nationale. Ainsi, en 2019 et en 2020 la Chine a été le pays à avoir déposé le plus de brevets au monde concernant la blockchain.

- Flm : Votre société a une composante conseil pouvez-vous nous en dire plus (Domaines d'intervention, population cible ...) ?

LD : Nous intervenons majoritairement auprès de sociétés très jeunes, voire même auprès de porteurs de projets en phase de développement de leur idée. Notre domaine d’intervention englobe la stratégie opérationnelle, la conception et le développement produit, l’expansion commerciale et les levées de fonds. Dans certains cas nous aidons ces entreprises sur le long terme en tant que « Directeur Financier Décentralisé » jusqu’à ce que le recrutement d’un DAF à temps plein soit nécessaire.

Notre activité de conseil fait partie intégrante de notre processus d’investissement et de gestion de portefeuille afin de favoriser au maximum le succès de nos sociétés en portefeuille.

- Flm : Revenons aux nouvelles technologies en général, des licornes peuvent-elles émerger en dehors des USA et de la Chine ?

LD : Tout à fait !

Tout d’abord il faut bien mentionner Israël, qui avec ses 45 licornes est le pays qui compte le grand nombre de licornes per capita au monde. Ceci est dû à la situation particulière de ce pays isolé du Moyen-Orient où la technologie est impulsée au plus haut niveau par ses besoins essentiels en matière d’agriculture, d’énergie et de sécurité. A l’instar de la Silicon Valley des années soixante, qui a connu une explosion technologique grâce aux contrats du ministère de la défense américain, ce sont les pouvoirs publics israéliens qui ont impulsé la révolution technologique du pays au début des années deux-mille, créant un enrichissement de l’écosystème entrepreneurial et entraînant un cercle vertueux au fil des succès.

Il faut aussi citer les liens forts du pays avec les Etats-Unis, grâce auxquels s’est formé un modus operandi classique propre aux entrepreneurs israéliens consistant à créer son entreprise en Israël et y baser sa R&D, obtenir une première validation du marché puis transférer ses équipes de ventes aux Etats-Unis pour attaquer le marché au plus haut PIB du monde et ses trois-cent trente millions de consommateurs.

L’Europe souffre encore de sa réputation de ne pas savoir créer de licornes, dû au manque d’exits marquants émanant du vieux continent. Contrairement aux Etats-Unis, où le capital-risque ne s’est jamais vraiment éteint après le traumatisme de 2001 et a recommencé à croître fortement à partir de 2009, le capital-risque européen n’a vraiment redémarré qu’a partir de 2013. Etant donné que l’âge moyen d’une entreprise lors de son exit est de 8 ans et dans le contexte de capital abondant entraînant des « mega-rounds » (plus de cent millions de dollars) retardant le besoin de vente ou d’introduction en bourse, il est encore trop tôt dans le cycle Européen pour tirer de réelles conclusions. Sur le papier, l’Europe compte de nombreuses licornes (dont beaucoup de fintechs) et les excellentes performances de certains fonds européens dévoilées récemment laissent présager un écosystème puissant et un futur radieux.

- Flm : Pour conclure quel serait l'intérêt pour un investisseur marocain d'investir à travers le capital risque dans des startups technologiques à l'international ? (Intérêt financier et stratégique) ?

LD : Pendant la première décennie du XXIe siècle, s’est construit la fondation du monde digital. Pendant la deuxième décennie, portée par les nouveaux moyens de communication, l’innovation digitale s’est accélérée, s’est démocratisée est s’est étendue à tous les domaines de la société (par exemple la fintech n’est vraiment née qu’à partir de 2013).

Je ne peux imaginer un autre futur que celui où la portée de la technologie croît exponentiellement. Investir en capital-risque permet non seulement de contribuer au progrès social mais également de profiter d’une opportunité financière unique.

Par ailleurs, le capital-risque donne un accès privilégié à de nombreuses opportunités de transfert de technologies de pointe tout en bénéficiant d’un risque financier mitigé par la distribution en portefeuille et l’expertise du gestionnaire.

 

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